Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

V


Pendant un jour, la chambre demeura vide. À deux reprises, j’eus un grand espoir, puis une désillusion.

L’attente était devenue mon habitude, mon métier. Je remis des rendez-vous, j’ajournai des démarches, je gagnai du temps, au risque de compromettre ma situation ; j’organisai ma vie comme pour un nouvel amour. Je ne quittais plus ma chambre que pour descendre à la table d’hôte, où rien ne me distrayait plus.

Le second jour, je vis que la chambre était préparée pour recevoir un nouvel occupant ; elle attendait. Je fis mille rêves sur ce que serait cet hôte, tandis qu’elle gardait son secret comme quelqu’un qui pense.

Le crépuscule vint, puis le soir, qui l’agrandit sans la changer, et déjà, je me désespérais, lorsque la porte tourna dans l’ombre et j’aperçus, sur le seuil, le spectre d’un homme.