essayer de me débattre comme pour m’envoler de moi. Je ne peux pas accorder au monde d’autre réalité que celle de mon imagination. Je crois en moi et je suis seul, puisque je ne peux pas sortir de moi. Comment imaginer sans folie que je puisse sortir de moi-même ? Comment imaginer sans folie que je ne sois pas seul ? Qu’est-ce qui pourrait me prouver qu’au delà de l’infranchissable pensée, le monde a une existence séparée de moi !
J’écoute la métaphysique (elle n’est pas une science : elle est située au delà du programme scientifique ; elle est plutôt assimilable à l’art, s’attachant comme lui à la vérité vraie : car si un tableau est puissant et si un beau vers est beau, c’est à cause de la vérité). Je parcours les livres, je consulte les savants et les penseurs, je réunis tout l’arsenal des certitudes que l’esprit humain a réunies, j’écoute la grande voix de celui qui a passé toutes les croyances et tous les systèmes au crible de sa raison terrible, et je lis cette vérité même qui s’imposait à moi : On ne peut pas nier la pensée qu’on a du monde, mais on ne peut pas certifier qu’il existe en dehors de la pensée qu’on en a.
Et maintenant que j’ai cette affirmation enfermée précisément, effectivement, dans des mots, maintenant que je tiens cette richesse sublime, je ne peux plus m’écarter du miracle de simplification qu’elle apporte.
Non, il n’est pas sûr que la vérité qui commence en nous continue ailleurs, et lorsque, après avoir dit cette parole que personne après lui n’a pu même songer à nier : « Je pense, donc je suis »,