Puis, en présence de la blessure hideuse vue de près une fois de plus, ils s’élevèrent à des pensées plus générales, plus grandes. Je pressentais ce travail qui se faisait dans leurs cerveaux ; enfin, une phrase résonna :
— Ça se forme comme un enfant.
Le vieillard se mit à parler :
— Comme un enfant. Le germe agit sur la cellule, ainsi que l’a dit Lancereaux, à la façon d’un spermatozoïde. C’est un micro-organisme qui pénètre l’élément anatomique, qui le sélectionne et l’imprègne, le met en puissance vibratoire, lui donne une autre vie. Mais l’agent excitateur de cette activité intra-cellulaire, au lieu d’être le germe normal de la vie, est un parasite.
« Quelle que soit la nature de ce primum movens, que ce soit le micrococcus neoformans, ou la spore encore invisible du bacille de Koch, ou tout autre, — toujours est-il que le tissu parasitaire cancéreux évolue au début comme le tissu fœtal.
« Mais le fœtus aboutit. Il y a un moment où la masse embryonnaire enkystée dans la matrice est devenue, pour ainsi dire, adulte. Elle constitue ses membranes superficielles, que Claude Bernard appelle, en sa terminologie profonde, limitantes. Le fœtus est achevé ; il va naître.
« Le tissu cancéreux, lui, ne s’achève pas ; il continue, sans arriver jamais à ses bornes. La tumeur