Ils sentent que tout passe, que tout s’use, que tout finit, que tout ce qui n’est pas mort va mourir, et que même les liens illusoires qui sont entre eux ne sont pas durables. L’écho des paroles de l’inspirée retentit comme un souvenir de musique splendide qui demeure : « Du moment que tout fuit, on est seul. »
Ce même rêve ne les rapproche pas. Au contraire. Ils sont tous deux, en même temps, pliés dans le même sens… Le même frisson, venu du même mystère, les pousse vers le même infini. Ils sont séparés de toute la force de leurs douleurs. Souffrir ensemble, hélas, quelle désunion !
Et la condamnation de l’amour lui-même sort d’elle, coule et tombe d’elle, en un cri d’agonie :
— Oh ! notre grand, notre immense amour, je sens bien que, peu à peu, je m’en console !
Elle avait rejeté le cou en arrière, levé les yeux.
— Oh ! la première fois ! dit-elle.
Elle reprit, tandis que tous deux voyaient cette première fois, où leurs deux mains s’étaient, parmi les êtres et les choses, trouvées :
— Je savais bien que toute cette émotion mourrait un jour, et malgré les promesses palpitantes, je n’aurais pas voulu que le temps passât.
« Mais le temps est passé. Nous ne nous aimons presque plus… »
Il fit un mouvement qui retomba.