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DE CESAR.

Au fond de votre cœur l’amour parle pour moi.

Octavie.

D’un malheureux amour que ſert la voix plaintive ?
Il parle dans un cœur que le devoir captive.
Par de ſuprêmes loix Brutus eſt mon époux,
Et vous n’avez, Seigneur, que mes ſoupirs pour vous.

Antoine.

Quoi vous accepteriez l’époux qu’on me prefere !
Mais quel devoir ! Je ſçai qu’Octave votre frere
D’une ſœur de Céſar tient la clarté du jour :
Mais vous, lorſqu’au devoir vous immolez l’amour,
Devez-vous à Céſar la même obéiſſance ?
Une autre que ſa ſœur vous donne la naiſſance.

Octavie.

Quoi Céſar m’aſſocie à d’illuſtres ayeux ;
Il m’unit à ſon ſang par un choix glorieux :
Il m’adopte, & j’irois l’obliger à reprendre
Tout l’éclat que ſur moi ſa main daigne répandre !
Que n’auroit pas alors l’envie à publier ?
Mais quand juſqu’à ce point j’oſerois m’oublier,
Ignorez-vous, Seigneur, qu’Octavien mon pere,
A ſoumis à Ceſar Octavie & ſon frere ?
Qu’enfin c’eſt à lui ſeul qu’au moment de ſa mort,
Il tranſmit tous les droits qu’il avoit ſur mon ſort.

Antoine.

He bien ! obéiſſez, trahiſſez-moi, cruelle :
Mais ne prétendez pas qu’à moi-même infidelle,
J’acheve des projets pour vous ſeule entrepris,