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TOMYRIS,
Mandane.

Et ſon ſang… Arrêtés, moderez ce tranſport,
Ce ſeroit l’épargner que lui donner la mort.
Qu’il vive dans vos fers, que pour prix de ſon crime,
D’un éternel remors ſon cœur ſoit la victime.

Aryante.

Et vous le haïſſez ?

Mandane.

Et vous le haïssez ? Si je le hais ! grands Dieux !
A-t-il rien oublié pour ſe rendre odieux ?
Mais, Seigneur, je le vois ; en vain de ma vengeance
Mon cœur ſur votre amour a fondé l’eſperance,
Et j’ai trop préſumé de mes foibles appas,
Quand j’ai cru…

Aryante.

Quand j’ai cru… Juſte Ciel ! je ne vous aime pas !
Ah ! depuis le moment que mon ame éperdue
A pris dans vos beaux yeux cet amour qui me tue,
Vos rigueurs, vos mépris, le bonheur d’un rival,
Ont-ils éteint l’ardeur d’un poiſon ſi fatal ?
Pour vous mettre à couvert des fureurs de ma mere
Prête à venger ſur vous tout le ſang de mon frere,
N’ai-je pas devoué ma tête à ſon courroux ;
Helas ! combien de fois ai-je tremblé pour vous !

Mandane.

Hé bien, ſi vous m’aimez, oſez tout entreprendre.
Pour mettre votre amour en droit de tout prétendre ;
Si ma main eſt pour vous un aſſez digne prix,