Et pourquoi comme un fou tu frappes des talons ;
Pourquoi tes cheveux noirs hérissant ton visage,
Sur ton manteau troué répandent leur ombrage ;
Pourquoi la pâleur siège à ton front soucieux ;
Pourquoi, tel qu’un voleur tu détournes les yeux.
Oh ! Tu n’es pas le seul à baisser la paupière,
Mon corps, tout brun qu’il est, n’est pas non plus de pierre,
Et je sens comme toi, sous sa rude épaisseur,
Que notre ciel n’a pas de reflet en mon cœur.
Eh ! Qui peut aujourd’hui prendre un habit de fête,
De raisins verdoyants se couronner la tête,
Et, levant par le coin un rouge tablier,
Danser la tarentelle à l’ombre du halier ?
Qui peut, ami, qui peut s’enivrer de musique,
Et des beaux jeux fleuris de notre terre antique,
Quand la douleur partout nous ronge comme un ver
Notre vie ici-bas est un citron amer
Que ne peut adoucir nulle saveur au monde
Nous sommes beaux enfants d’une mère féconde,
Sous le joug attelés comme nos taureaux blancs :
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