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grand’chose contre le mal de Lasthénie… Elle alla pourtant le chercher avec empressement, et il vint. Il interrogea mademoiselle de Ferjol, mais il ne tira pas beaucoup de lumière de ses réponses. Elle dit qu’elle sentait en elle un brisement et une langueur invincibles, accompagnés d’un mortel dégoût pour toutes choses.

— Même pour Dieu ?… — lui lança sa mère avec une ironie pleine d’amertume.

Mot qu’elle ne put retenir, tant elle lui en voulait de cette communion refusée, la veille ! Lasthénie, qui ne se plaignait jamais, reçut le coup de ce mot sans se plaindre. Mais elle sentit, comme une menace prophétique de l’avenir, que la pitié de sa mère — qu’elle avait toujours trouvée bien rigide — pourrait un jour devenir cruelle.

Agathe avait-elle eu raison, dans ses pensées ?… Mais si le médecin comprit quelque chose au mal de mademoiselle de Ferjol, il n’en laissa rien soupçonner à sa mère. Il ne lui dit rien de net sur l’état de sa fille. Madame de Ferjol, qui n’était jamais malade : « J’ai en santé, disait-elle quelquefois, ce qui m’a