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ils s’étaient évanouis, comme ces Saintes Apparitions qui visitent quelquefois l’homme de bien dans sa demeure. »

Mais Chateaubriand et son Génie du Christianisme n’existaient pas au moment où s’ouvre cette histoire, — et ces dames de Ferjol n’avaient jusqu’alors reçu chez elles que des religieux d’Ordres moins poétiques et moins sévères, qui, hors de l’église, se retrouvaient gens du monde et qui ne partaient pas des maisons où ils avaient été reçus, sans toutes les révérences de rigueur.

Seulement, le Père Riculf n’était point assez dans les bonnes grâces de ces dames, pour qu’elles fussent blessées, comme Agathe, de la silencieuse soudaineté de son départ. Il s’en allait ; eh bien ! qu’il s’en allât ! Il les avait plus gênées qu’il ne leur avait été agréable, tout le temps qu’il était demeuré chez elles. Leur deuil serait léger. Une fois parti, elles n’y penseraient plus. Mais la vieille Agathe avait, elle, des ressentiments plus profonds. Le Père Riculf était, pour elle, ce quelque chose d’inexplicable et d’absolu, qu’on appelle une antipathie.