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dans les langues du pays à cause d’elle » — était la première, et dont les deux autres étaient d’avoir élevé mademoiselle de Ferjol et d’être restée dans ce « trou de marmotte » qu’elle détestait ; car elle ruminait éternellement sa patrie, cette fille du pays des grands bœufs et des vastes herbages ! C’était enfin d’avoir vécu de cette vie en commun qui devient moralement plus étroite, à mesure qu’on est moins à la partager. Malgré la bonhomie qu’ont, avec les petites gens, les êtres fiers à l’âme élevée, car la fierté n’est pas toujours de l’élévation, si madame de Ferjol, qui les avait eus, n’eût pas congédié ses vingt domestiques, la vieille Agathe, respectueuse au fond, mais familière dans la forme, n’aurait peut-être pas eu autant de hardiesse et de franc-parler qu’elle en avait.

— Mais, Agathe, que dites-vous donc là ? — dit madame de Ferjol avec un grand calme, — parti ! Le Père Riculf ! Y songez-vous, ma fille ?… C’est aujourd’hui le Samedi-Saint et il doit prêcher aux Vêpres de demain, jour de Pâques, le sermon de la Résurrection qui clôt toujours la prédication du Carême !