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sine, pouvaient la traverser, même sans parapluie, lorsqu’il pleuvait. Quant à leur maison, c’était un vaste bâtiment sans style, d’une époque très postérieure à l’église. Les aïeux du baron de Ferjol l’avaient habitée pendant bien des générations, mais elle n’était plus en harmonie avec les besoins du luxe et les mœurs de l’époque (expirante alors) qui avait été le dix-huitième siècle. Habitation antique et incommode, qui eût fait plaisanter les architectes du confort et les architectes de l’agrément ; mais quand on a du cœur, on se moque de toutes les risées et on ne vend pas ces maisons-là ! Pour s’en défaire, il faut la ruine, la ruine désespérée, qui vous y force et qui vous en arrache : amère angoisse ! Les coins noirs de ces maisons vieillies, et quelquefois délabrées, qui ont vu nos enfances et dans lesquels les âmes de nos pères sont peut-être tapies, crieraient contre nous, si nous les vendions pour le vulgaire et vil motif qu’elles ne répondent plus au luxe et aux mollesses du siècle… Madame de Ferjol, qui était d’un autre pays que les Cévennes, aurait bien pu se débarrasser de cette grande et vaste maison