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le bonheur qu’elle donne aux âmes véritablement religieuses.

Il y avait dans cette fille, si virginale pourtant, quelque chose de plus ou de moins que ce qu’il faut pour être heureuse seulement en Dieu et par Dieu. Elle remplissait tous ses devoirs de chrétienne avec la simplicité de la foi. Elle suivait sa mère à l’église, l’accompagnait chez les pauvres que madame de Ferjol visitait souvent, communiait avec elle, les jours de communion, — mais tout cela ne mettait pas sur son front mat le rayon qui sied à la jeunesse ! « Tu n’es peut-être pas assez fervente ?… » lui disait madame de Ferjol, inquiète de cette mélancolie inexplicable avec une vie si pure. Doute et question sévères ! Ah ! cette mère folle à force de sagesse eût mieux fait de prendre la tête de son enfant chargée de ce poids invisible qui n’était pas le poids de ses magnifiques cheveux cendrés et de la lui coucher sur son épaule, cet oreiller de l’épaule d’une mère, si bon aux filles pour s’y dégonfler le front, les yeux et le cœur. Mais elle ne le fit point. Elle se résista à elle-même. Cet oreiller où l’on dit tout,