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Mais ce soir-là ces deux femmes furent trompées dans leur petite curiosité de femmes de province. Quand elles sortirent de l’église, elles n’eurent aucune observation à se communiquer sur ce terrible prédicateur d’un dogme terrible, si ce n’est sur son talent qu’elles trouvèrent grand. Elles n’avaient pas, se dirent-elles, à la sortie de l’église, en s’entortillant dans leurs pelisses, entendu jamais mieux prêcher une Ouverture de Carême. Elles étaient dévotes, pieuses comme des anges, selon la sacramentelle expression. C’étaient madame et mademoiselle de Ferjol. Elles rentrèrent chez elles très animées. Les années précédentes, elles avaient vu et même logé beaucoup de prédicateurs, des génovéfains, des prémontrés, des dominicains et des eudistes, mais de capucin, jamais ! Personne de cet ordre mendiant de saint François d’Assise, dont le costume — et le costume préoccupe toujours plus ou moins les femmes — est si poétique et si pittoresque. La mère, qui avait voyagé, en avait vu dans ses voyages, mais la fille, qui n’avait que seize ans, ne connaissait de capucin que celui qui faisait baromètre au