Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/84

Cette page a été validée par deux contributeurs.

le pavé et se furent replongés dans la silencieuse poussière qui comble l’ornière de ces chemins, l’été, Sombreval, après s’être dressé sur ses étriers pour voir s’il n’y avait pas quelque oreille cachée derrière les haies, dit à Néel ce que lui avait appris l’abbé Méautis…

À cette terrible confidence, le violent jeune homme qui, — comme Sombreval, — ne trouvait devant lui que l’ennemi invisible, cette chose sans visage qu’on appelle le bruit public, poussa presque des rugissements de douleur…

Il aurait voulu venger Calixte sur l’heure, et il ne le pouvait pas ! Sur qui pouvait-il la venger ?… Sombreval ne lui avoua point qu’il avait été plus heureux, si tant que frapper soulage l’âme quand elle est ivre de cette absinthe amère qu’y versent l’oppression de la faiblesse et l’injustice. Il ne raconta pas la mort tragique de la Gamase. Il ne raconta que la visite du curé et la résolution qui l’avait suivie…

— Vous voyez, Néel, — fit-il — en achevant, si la pauvre enfant peut être plus compromise qu’elle ne l’est, comme dit le monde dans son langage, et si vos visites au Quesnay seraient un danger, quand tout est à peu près perdu ! — ajouta-t-il avec une mélancolie désespérée.

— Pas perdu sans ressource, monsieur, — fit à son tour Néel qui pénétrait ce grand stoï-