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vicomte essaya-t-il de consoler Bernardine à sa manière :

— Il reviendra après une campagne, lui dit-il, et avec l’embellissement de quelque beau coup de sabre à travers la figure, et il vous trouvera, ma bru, embellie de quelque gros garçon que vous aurez dans les bras.

Mais tout fut faux dans les prophéties du vicomte : Néel de Néhou ne revint pas. Il se fit tuer dans une des plus célèbres batailles du temps, en poussant son cheval le poitrail sur une pièce de canon, qui coupa en quatre l’homme et le cheval. C’était juste trois mois après la mort de Sombreval et de la Malgaigne.

Bernardine n’eut point d’enfant. Elle aurait pu faire au vieux Éphrem une confidence bien cruelle, mais la noble et pudique femme dévora sans se plaindre son humiliation, comme elle avait dévoré toutes ses larmes. Veuve sans cesser d’être vierge, elle prit le voile aux carmélites de Valognes sous le nom de Sœur Calixte, par un touchant sentiment de reconnaissance pour l’être angélique qui avait voulu la faire heureuse.

— Et le médaillon ? — fis-je encore à Rollon Langrune qui, de cette fois, croyait en avoir fini de son histoire et de mes questions.

— Ah ! le médaillon ! répondit-il. Il est probable qu’il appartenait à Sombreval, car, lors-