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moi qui suis la cause de tout le mal que vous voyez, et j’en souffre presque autant que vous, mais il m’est pourtant impossible de m’en repentir !

Le calme, quand il est auguste, a toujours cassé les bras à la violence. Néel fut dompté par la douceur du prêtre. Ses mains qui l’étreignaient, tombèrent…

Alors l’abbé lui raconta de point en point ce qui s’était passé depuis son absence. Néel, le fougueux Néel, écouta dans le denier degré de la surprise et presque de l’effroi, de l’effroi qui tua en lui toute colère, le récit du curé, dont les révélations surnaturelles concordaient si bien avec ce qu’il savait, lui, Néel, et ce que dans le monde entier il savait seul !… Religieux comme il l’était, d’instinct et d’éducation maternelle, il admira comment, à l’heure même où il prenait l’engagement dans son cœur de partager le mensonge de Sombreval, Dieu, le maître des circonstances, rendait inutile cet engagement et le frappait de nullité. Il s’émerveilla de l’aspect providentiel qu’avaient subitement pris les choses… Il ne se crut plus obligé de garder avec ce prêtre, divinement informé, le secret de Sombreval, dont il était le dépositaire et qu’il avait gardé avec la Malgaigne. Il l’aurait gardé avec l’univers, mais il fut vaincu par cette main de Dieu, si visible.