Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/217

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

instant, de la voir tomber à ses pieds, et prêt à la recevoir dans ses bras comme sa fille qu’elle était…

Mais elle ne tomba pas. Elle ne poussa pas son cri, l’annonce effrayante de ses crises ! ce cri qui perçait tout et que l’organisation, cette bête ! poussait à l’approche de son vautour.

L’abbé surpris crut au miracle…

Elle était toujours debout… Mais aux premières paroles de l’abbé elle avait plongé son visage dans ses mains, comme on ferait au premier éclair qui brûle les yeux dans un orage. Et pendant qu’il parlait, elle avait continué de plonger plus avant, dans le creux de ses mains, de presser un peu plus, de ses deux mains, sa tête épouvantée, comme si elle eût vu la vérité, l’accablante vérité se lever pour elle dans les tendres et pathétiques paroles du prêtre !

Et quand il eut fini :

— Ô mon bien-aimé père ! — s’écria-t-elle d’une voix comprimée, du fond de ses mains qui pressaient frénétiquement son visage… Au mouvement convulsif des épaules, l’abbé Méautis crut qu’elle pleurait et qu’elle voulait cacher ses larmes, et il se dit qu’il était bon qu’elle pleurât… que la crise ne viendrait point… ni la contraction, ni l’horrible rigidité… ni les autres symptômes… Mais la peur le prit avec une main bien autrement froide que s’il l’avait