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quent comme un front d’aveugle : il parlait comme deux yeux ! Comparaison d’autant plus vraie que Sombreval, aveugle volontaire pour tout ce qui l’entourait, garda ses yeux imperturbablement baissés sur son missel pendant tout le temps de la messe. Néel n’en vit pas une seule fois darder le feu de dessous les touffes grises de ces sourcils terribles qui les ombrageaient, le buisson d’Horeb de ce regard, caché là-dessous, comme Dieu ! Quand la messe fut dite, Néel se plaça sur le passage de Sombreval comme il sortait de l’église pour regagner sa cellule par la cour intérieure du Grand-Séminaire, mais les yeux de Sombreval ne se relevèrent point, et le grand pénitent (on l’appelait déjà ainsi dans Coutances) passa absorbé en lui-même ou en Dieu, le long de la rangée des personnes qui se poussaient un peu pour le voir. Il semblait que cet homme, qui ne regardait que la terre, ne lui appartînt déjà plus.