Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/189

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Dès le soir même, elle en parla à Néel. Néel avait laissé partir pour Néhou monsieur de Lieusaint et sa fille. Quand on était arrivé à la grille du Quesnay, Néel était allé chercher l’un des Herpin, qui vint prendre la carnassière du vieux chasseur, et il n’avait pas reparu. Monsieur de Lieusaint ne l’attendait pas. « Il nous rattrapera, dit-il légèrement en saluant Calixte. Nous irons doucement. »

Mais c’était de la fierté qui se couvrait par cette parole. Monsieur de Lieusaint savait bien que Néel ne reviendrait pas. Néel voulait passer au Quesnay l’importune soirée qui l’attendait à Néhou avec Bernardine ; mais au Quesnay, il trouva Bernardine encore. Il la trouva… sur les lèvres de Calixte… à la place même où avec l’amour qu’il avait pour Calixte il devait le plus la détester !

— La tuerez-vous donc, Néel, lui dit Calixte, pour prix de vous avoir aimé ? la tuerez-vous sans profit pour vous et pour une autre, pour le plaisir aveugle et cruel de tuer une jeune fille qui vous a choisi et que vous avez choisie, qui a mis, sur votre parole, sa vie et son cœur, qui est presque votre femme, cher Néel, car le consentement des pères, c’est le mariage devant Dieu !

Mais Néel n’écoutait pas. Il était arrivé, en entendant Calixte lui parler de Bernardine, à