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même pour la faire heureuse ; mais l’abbé Méautis voyait la gloire de Dieu, comme Néel le bonheur de Calixte.

Sans cette idée de la gloire de Dieu, le rôle cruel que l’abbé Méautis, cette âme de jeune fille pour la pitié et cette âme de Saint pour l’amour, finit par jouer dans cette histoire, serait vraiment inexplicable. Mais aux yeux d’une âme qui avait une telle puissance d’adoration et de foi, demandez-vous ce que devait être la profanation du corps et du sang de Jésus-Christ par un hypocrite qui mépriserait intérieurement la singerie de ses mains et de ses paroles et n’en viendrait pas moins tous les matins jouer son infâme comédie sur l’autel ?…

Certes, quand l’abbé Méautis avait lu dans l’histoire les plus célèbres et les plus abominables profanations, il avait été pénétré d’horreur vraie : mais qu’était-ce que le cheval du Barbare, mangeant son avoine sur l’autel de saint Pierre ? qu’étaient les calices servant de verre aux soldats dans d’épouvantables orgies, et même les pains eucharistiques traînés dans la fange, en comparaison de cette hostie descendant, tous les jours, à point nommé, dans la poitrine d’un athée, devenu d’apostat un Tartuffe tranquille et monstrueux ?

L’outrage le plus sanglant fait à un père et qui recommencerait chaque jour ne donnerait