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nissent leurs luttes avec eux-mêmes : « Ma foi, tant pis ! » et qu’il accepta, dans l’égoïsme de la voir heureuse (même à ce prix !) l’imposture de Sombreval et tous les sacrilèges qui allaient s’ensuivre. Sombreval mandait dans sa lettre que l’autorité religieuse s’était montrée pour lui pleine de généreuse miséricorde et qu’il avait l’espoir de rentrer bientôt dans le saint Ministère. Cette espérance ravissait Calixte et donnait à sa beauté d’élue comme une réverbération des portes du Ciel.

Mais l’abbé Méautis, qui aimait, non pas, lui, une créature humaine, comme Néel, mais qui aimait Dieu, le Dieu que Sombreval allait outrager plus cruellement que jamais, ne perdit point, comme Néel, dans la contemplation du bonheur de Calixte, le souvenir des choses de la veille. Au contraire : ce souvenir s’enfonça un peu plus dans son âme, comme une brûlure s’enfonce dans les chairs… Peu d’esprits, si ce n’est ceux-là qui comprennent tout, comprendront bien ce caractère de l’abbé Méautis.

On ne comprend guère que les sentiments dont on est capable, et l’amour de Dieu est certainement le plus rare, parce qu’il est le plus élevé de tous les amours. Or, pour ce prêtre, ce prêtre toujours poète, quoiqu’il eût renoncé à ce que le monde appelle la poésie,