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être porté moins fort que juste. Et d’ailleurs, pourquoi aurait-il insisté ? Avec l’immense place que tenait Sombreval dans l’imagination publique, il aurait toujours bien l’occasion d’y revenir.

Est-ce que les quelques mots qu’il venait de prononcer n’auraient pas pour échos toutes les chaires des paroisses voisines et ne seraient pas commentés dans tous les cimetières d’alentour ? En ce temps-là, dans la presqu’île du Cotentin, l’opinion publique s’ébauchait, avant ou après les offices, dans les cimetières qui ceignaient l’église, pour s’achever sous les tentes des Assemblées et les poutres des cabarets. Tous les dimanches, avant et après la messe, mais plus particulièrement après les vêpres, des groupes se formaient, en grand nombre, parmi ces paysans, dispersés toute la semaine dans les champs, et ils restaient à deviser, comme ils disaient, les hommes debout entre eux, et les femmes entre elles, assises sur le talon de leurs sabots dans l’herbe haute et verdoyante de toutes ces tombes ou sur la barre peinte en ocre, des échaliers ; et le soleil couchant, longtemps encore après complies, éclairait, de ses rougeurs mélancoliques, les derniers de ces groupes attardés.

Or, le soir de ce dimanche-là, ils venaient tous de disparaître. Le dernier s’était lente-