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pouvait sortir de son lit et se livrer à tous les actes incompréhensibles de cet état resté encore jusqu’à cette heure, malgré le progrès de la science, si profondément mystérieux. Vous vous rappelez qu’un soir on l’avait surprise sur les bords de l’étang, pieds nus, marchant où tout être humain, réduit à ses seules forces naturelles, aurait glissé et serait tombé au fond du gouffre.

Une autre fois, on l’avait aperçue escaladant les murs du château et se risquant, avec une lucide adresse, sur cette ligne, étroite comme une corde, que forment, en se rejoignant, les deux côtés du toit, adossés l’un à l’autre, entre les cheminées et les girouettes… Phénomènes qui n’étonnent plus maintenant, tant l’état nerveux du monde, surexcité par une civilisation excessive, a changé en un demi-siècle ! mais qui, alors inconnus, n’avaient qu’un nom dans cette contrée chrétienne et simple : — « la punition de Sombreval. »

Néel, qui ne voyait que Calixte, ne pensait pas à ses lèvres saignantes et blessées. Il se révoltait contre sa violence. Il s’accusait de cruauté. Il se disait qu’à peine Sombreval parti, il payait la confiance de ce père en abattant le mal sur son enfant, et il ne savait même pas combien de temps durerait ce mal dont il était la cause ! Il éprouvait la plus grande douleur