Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/288

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était facile de ramener la capote de cuir nécessaire contre la température pluvieuse et froide du Nord.

Un seul cheval aurait suffi pour enlever cette voiture construite d’après un système qui la rendait extrêmement roulante, mais Néel aimait à en mettre deux, et il lui fallait une adresse et une vigueur de main supérieures pour les conduire, sans accident, dans les chemins pierreux du Cotentin.

— Il va chez sa maîtresse et il veut faire le faraud, — pensa le vieux palefrenier Jean Bellet, qui couchait à l’écurie avec ses bêtes, quand il le vit regarder l’essieu du briska. — Et le brave homme, se tirant de dessous ses serpillières, se prépara à atteler les chevaux qui servaient habituellement à cette voiture ; mais quel ne fut pas son étonnement et même son épouvante, quand Néel lui dit :

— Ce ne sont pas là les chevaux qu’il faut atteler, Jean ! mais les poulains du Mellerault.

Jean Bellet crut que son jeune maître devenait fou. Les poulains du Mellerault étaient de l’air et du feu sous des nerfs et des muscles. C’étaient de jeunes chevaux, effrayants d’ardeur. Néel aimait les chevaux comme tout gentilhomme de loisir ; il faisait des élèves. Les poulains du Mellerault (comme il les appelait du haras de ce nom) étaient des chevaux de trois