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Il était de son temps, le vicomte Éphrem. C’était un de ces derniers gentilshommes dont les mœurs ont plus fait contre la monarchie que leurs épées pour elle, quand ils la tirèrent pour la défendre. Jeune et débutant dans le monde à l’instant où le règne de Louis XV finissait, le vicomte avait vécu comme on vivait dans la Maison-Rouge, en 1756, et comme quelques émigrés continuèrent à vivre dans plusieurs cours étrangères où ils importèrent les vices brillants des mœurs françaises.

On ne sait pas assez à quelle profondeur la corruption du XVIIIe siècle pénétra la vie des hommes dont elle avait meurtri la jeunesse. La tache y resta toujours, et ni le malheur, ni la guerre, ni la Religion, pour laquelle beaucoup se battirent et moururent, ne purent l’effacer.

Croirait-on, si tous les documents ne l’attestaient, que le terrible draconien Charette lui-même, ce dur partisan, au milieu des plus âpres misères d’une existence incessamment menacée, était une espèce de sultan, — un homme à femmes, ayant sa petite maison comme un seigneur du temps de Louis XV, et tenant sa cour de galanterie dans sa ferme de Fonte-Clause, au fond du Poitou ?…

Le vicomte de Néhou, qui n’avait rien de ce loup de fourré, le vicomte de Néhou, le