faire rejaillir sur personne et qu’il la garda pour lui seul. Ce qui est certain, c’est qu’il était de loin et qu’il était venu par la mer. C’était un soldat, — beau et jeune comme vous, monsieur Néel. Il passa deux fois seulement dans ces parages, — une première fois pour rejoindre son régiment en Bretagne, à ce qu’on dit, et une seconde pour faire son coup et pour y mourir… À la première fois, étant adlaisi[1], il s’arrêta au bourg de S…, pour s’y rafraîchir à la Branche de Houx, chez Travers. Il y avait là une troupe de niolles[2] qui se mirent à virer et à bourdonner autour de ce bel habit blanc, comme un essaim d’avettes[3] autour d’un cerisier en fleur. J’étais en journée chez Travers, filant dans l’en-bas de l’auberge, déjà plus sérieuse que toutes ces jeunesses, quoique je fusse bien jeune alors, mais je commençais à m’assotir[4] aux sorcelleries et aux curiosités impies. « Tu devrais bien lui dire son sort », me fit la fille à Travers, la boiteuse. On aurait dit que c’était le sien qu’elle me demandait.
Je ne voulais pas, mais elle me tourmenta comme une vêpe. Lui s’était assis à moitié sur le