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C'est aujourd'hui (cette nuit même) que se marie monsieur mon frère. Dans quelques heures la cérémonie va se faire, et deux vies ne seront plus que ... deux. Hélas ! Toujours deux ! L'unité est-elle donc impossible ? Je n'ai pas voulu assister à la triste bouffonnerie, cependant il y aura là de bonnes figures à étudier. Le marié avec son enthousiasme légal, — la mariée avec sa confusion un peu hypocrite, — et les parents contemplant, l'oeil humide, le tableau du bonheur conjugal. — par une pareille nuit, l'église sera froide. Est-ce un présage ? Si je me mariais, moi, quel air aurais-je ? Quelque amour qu'on ait pour sa femme à vingt-six ans passés, peut-on avoir l'air heureux ? on a plutôt l'air triste quand le cœur est heureux à cet âge.

La crainte de tout perdre n'est-elle pas au fond (mais seulement au fond) de nos joies. Oh ! Je ne veux point y penser.

4 octobre 1836.

souffrant extrêmement dès le réveil. La poitrine enflammée et douloureuse, la tête lourde, les nerfs abîmés. — levé tard, vers onze heures ; la pensée aussi mal que le corps. — lu le journal. Rien que des sottises ! — é