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L’ÉCHANSON


À Clary.


 
Tu ne sais pas, Clary, quand heureuse, ravie,
Tu me tends ton épaule et ton front tour à tour,
Que dans la double coupe où je puise la vie
Il est un autre goût que celui de l’amour…
Ô ma chère Clary, tu ne sais pas sans doute
Qu’il est derrière nous un funèbre Échanson,
Dont la main doit verser d’abord, goutte par goutte,
Dans tout amour un froid poison.

Dès que nous nous aimons, cet Échanson terrible
Apparaît, ― et grandit, comme un spectre fatal ;
Il ne nous quitte plus… présent, quoique invisible,
De l’amour partagé mystérieux vassal.