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Allumé, si on se le rappelle, avec une simple cigarette de Stendhal (Racine et Shakespeare), il avait très bien pris ; et pour continuer d’aller toujours, — d’aller à merveille, — il n’était nullement nécessaire que Victor Hugo roulât dans ce feu l’énorme bûche qu’il y a roulée et qui pouvait l’éteindre ; car il y a des bûches qui éteignent le feu… Cela se voit, et cela tient, à ce qu’il paraît, à leur grosseur… D’un autre côté, comme le manche à balai de l’élève du sorcier, dans la ballade de Goethe, qui va chercher de l’eau et qui finit par inonder la maison, les manches à balai de Victor Hugo sont allés chercher trop de bois, et ils auraient été capables de tout éteindre, par dessein et fureur de tout incendier. Que n’a-t-on pas dit sur Shakespeare depuis la publication de Hugo, et que ne dira-t-on pas encore ?

On voulut prouver qu’on peut jouer de l’hyperbole dans la note du maître ! Où il n’avait sauté que comme un robuste mouton, les panurgiens sauteront comme des béliers. N’ont-ils pas déjà paraphrasé sur Shakespeare le mot — trop gros aussi — de Michelet sur Alexandre Dumas : « Alexandre Dumas est une des forces de la nature » ? Ah ! si Alexandre Dumas est une des forces de la nature, je comprends très bien que Shakespeare soit toute la nature à lui seul, les forces vives de tout l’univers ! Je conçois Shakespeare Pan !Conséquence directe, du reste, de la tendance générale de ce temps, que toutes ces exagérations qui feront