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manque du mordant qui fait rester la tache sur un homme. Comme exécuteur en critique, il n’a ni la fermeté ni la justesse, ces qualités de tout bon bourreau. Que disons-nous ? A-t-il même une main ? Est-il une personnalité ? Est-il quelqu’un ? N’est-il pas simplement la Revue des Deux-Mondes ! N’est-il pas la main de M. Buloz, passée dans la manche d’un lauréat d’académie, pour rendre plus solennels les coups que l’on veut porter à l’une des plus grandes gloires littéraires du dix-neuvième siècle ? Au parti pris évident d’une critique qui n’excepte rien de ses condamnations et de ses ravalements, quand il s’agit d’un homme comme Balzac, M. Poitou est moins un critique que le garçon de la Revue des Deux-Mondes. On reconnaît en lui la rancune de cette Revue, qui se souvient de ses anciens procès avec Balzac quand il s’agit de lui faire le sien. Balzac, on se le rappelle, dit autrefois un mot sur M. Buloz, que M. Buloz eût pu effacer aujourd’hui, en souffrant une critique impartiale. Mais il n’a pas voulu que le mot fût oublié ; et, pour notre compte, nous disons tant mieux ! car le mot est gai et il continue d’être juste [1]. Quant au talent en soi de M. Poitou, il n’est pas de mesure avec la besogne qui lui a été imposée. Par le style, par le mouvement des idées, par le cant de sa diatribe morale et littéraire, M. Poitou est un rédacteur de la Revue des Deux-Mondes. Nous n’en dirons qu’un mot, mais il suffira.

Cette Revue qui fait dire à ses écrivains que M. de Balzac

  1. Ce mot, le voici : Vous n’êtes pas le directeur de la Revue, vous n’en êtes que le portier.