Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/310

Cette page n’a pas encore été corrigée

conduit à tous les crimes. Une fois qu’il l’aime, il ne la séduit pas : il se jette dessus. Séduire ! allons donc ! c’est de l’âme encore ! corrompue peut-être, mais intelligentielle ; c’est de la combinaison, détestable, il est vrai, mais spirituelle et volontaire, et ce forcené de chair et de sang qui s’appelle Bataille et qui ne conçoit que comme une bataille la volupté, ne se donne pas la peine d’en chercher si long… Premier bond de dégoût pour le cœur et l’esprit, quand on lit ce livre ; premier bond suivi de bien d’autres, quand on s’obstine à cette lecture, et on s’y obstine ; la violence du talent vous tient… Pas de séduction ! Une surprise ! une surprise qu’on ne peut pardonner, même à la bête humaine, car elle devient un arrangement et le plus honteux des esclavages entre ce mâle et cette femelle que l’on nous donne pour un homme mûr et pour une jeune fille !

L’amour même, comme les auteurs semblent l’admettre un instant, l’amour virginal de Rosette pour le jeune Paul ne la purifie point, ne l’arrache point à l’abominable concubinage dans lequel elle vit avec son beau-frère. M. Bataille, l’adorateur de M. Hugo, ne croit pas comme M. Hugo aux miracles purificateurs de l’amour, et il a raison. Rosette, la concubine d’Antoine Quérard, reste donc sa concubine, mais, comme elle aime Paul et qu’elle le lui a dit, elle se dégrade de plus en plus, et, dès cette heure, elle passe à l’état de bovarisme absolu.

Voilà, en effet, le rapport intime du roman de MM. Bataille et Rasetti avec le roman de M. Flaubert ! Il y a encore d’autres ressemblances entre ces deux romans, mais elles ne sont qu’à fleur de peau, et celle-ci