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galantins de ce temps appellent une tête forte, écrit de sa plume titubante de femme littéraire, « l’exercice de la vie est le combat éternel contre soi », et elle ne s’aperçoit pas qu’elle est en pleine contradiction avec elle-même ! Elle oublie que son héroïque Thérèse devrait, pour l’honneur de son honneur, un peu plus combattre contre les tentations de sa pitié ; que si Laurent est un fou, c’est du moins un fou incendié par la tête et qui a des éclairs lucides ; tandis qu’elle c’est bien pis qu’une folle, c’est un esprit faux et un cœur débile, toujours prêt à faire, sans aucun enthousiasme, l’exercice de la compassion en douze temps !

On comprend qu’il n’y a pas d’analyse à faire de cet exercice, horriblement monotone et prolongé dans le livre de Mme Sand. Thérèse est également infatigable dans ses dégoûts et dans sa pitié. Placée par l’auteur entre deux hommes, le forcené qui l’aime et l’insulte et avec lequel (il faut bien le dire !) elle a vécu, et un sage, mais un sage de l’école stoïque, qui lui propose de l’épouser pour la délivrer du joug honteux dont elle est brisée, elle refuse le sage, agréé d’abord, parce qu’il lui passe sur le front, à cet honnête homme, le nuage, bientôt chassé, d’une jalousie silencieuse, et elle retombe sous l’empire dégradant du forcené qui est bien pis que jaloux, lui, car il est infidèle…

Dans la conception de son sage infortuné d’Elle et Lui, Mme Sand, comme dans sa conception de Laurent, se pille elle-même. L’Américain Palmer rappelle beaucoup le Ralph d’Indiana. C’est un de ces grands cœurs philosophiques et chimériques, qui ramassent par