Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/25

Cette page n’a pas encore été corrigée

de l’auteur y fausse la vérité à toute page. Intellectuellement, d’ailleurs, « ce n’est pas une œuvre. L’ordonnance, l’unité, la science de la composition, n’y sont pas. L’idée en est venue, après coup, ex post facto, comme disent les juristes. » Balzac fit l’échiquier pour les pions et non les pions pour l’échiquier. Pour ce qui est de ces romans dont le rapprochement matériel a produit La Comédie humaine, « ils manquent de variété. Ils ne sont que la reproduction des mêmes types. » Ils pèchent par l’invention. Balzac au fond « était stérile. » Sans la gravité de son état qui l’empêche d’être pittoresque, M. Eugène Poitou nous peindrait Balzac tendant le chapeau à toutes les idées de son temps. Génie mendiant qui vivait d’aumônes. Mme Sand et M. Sue lui ont donné. Il est le Lazare de leurs dessertes ! Après cette vue d’ensemble sur l’homme et son œuvre, M. Poitou descend aux détails et continue de reprendre en sous-œuvre les opinions usées. « Balzac, dit-il, n’est qu’un peintre de genre. Il n’était qu’un Mieris. Son premier et son plus grand tort fut de se croire un Véronèse. » Le second fut de ne peindre « que des individualités, des exceptions, des hommes et non l’homme, et de les peindre sans mesure, sans sobriété, avec outrance » et non sagement, comme Lesage, ce Salomon, auteur de Gil Blas ! Enfin le style, « qui fait vivre les œuvres », est chez Balzac « matériel, inégal, surchargé, bizarre, trahissant l’effort », et il trahira sa mémoire, en ne l’arrachant pas à l’oubli.

Nous avons fini. Voilà, dégagé de ses développements et de ses déclamations, le fond du travail de M.