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toujours de peindre ressemblant et même de bien comprendre cette délicate, subtile et molle Italie, qui n’est pas qu’ardente et que violente, comme on le croit, et qui, n’en déplaise à messieurs les égalitaires, est au fond la plus aristocratique des nations !

On dirait même que cette vulgarité qui l’empêtre et l’empêche, M. Didier en a conscience, car il fait tout ce qu’il peut pour y échapper ! Il rit, il plaisante, il interrompt ses récits, aux moments les plus pathétiques, par de la causerie, par un dialogue qui veut étinceler, qui veut retentir, qui veut couper. Mais, hélas ! rien n’étincelle, ne retentit et ne coupe. En vain, comme cet Allemand qu’on cite toujours, saute-t-il par toutes les fenêtres pour se faire vif. S’il ne se rompt pas le cou à ce jeu, il se donne à la fois au moins quatre entorses. C’est là l’infortune de son talent et de sa volonté. Et on le conçoit. N’est pas plaisant qui veut l’être. La plaisanterie est le plus difficile et le plus charmant des mouvements de noire pensée, parce qu’il est le plus inné, le plus involontaire !

L’auteur des Amours d’Italie n’est pas né plaisant, et, affreux spectacle ! il s’acharne à l’être : mais, ne l’étant point en son nom personnel, il nous charrie des plaisanteries qui traînent sur toutes les routes de la conversation, des arrière-trains de plaisanteries. Par exemple, les noms polonais sont des éternuments. C’est plus vieux, cela, que l’émigration polonaise. Il en a bien d’autres, de ces mots-là. Il a aussi des anti-élégances : « Je suis trop poli pour vous démentir », fait-il dire aux personnages des belles compagnies qu’il invente. Dans Les Aventures de Bianca, il se croit ironique