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hommes ne peut voir, n’était réellement pas digne de le regarder !

Serait-ce le cas de M. Eugène Poitou, le nouveau critique qui vient de naître à La Comédie humaine ?… Nous avons lu avec l’attention que mérite toute tentative hardie le travail qu’il a publié, et nous n’y avons trouvé ni une observation inconnue, ni un reproche qui n’ait été déjà et bien ou mal à propos articulé. Le travail de M. Poitou n’est que la répétition pédantesque et très-fastidieuse de toutes les idées communes et hostiles qui ont été, à toutes les époques, exprimées sur Balzac depuis qu’il avait commencé la grande œuvre si prématurément interrompue par sa mort. Ce qu’une critique, superficielle toujours, injuste souvent, et quelquefois de la plus envieuse duplicité, a écrit pendant vingt ans contre un génie en train de faire sa voie, est reproduit par M. Poitou avec la fidélité aveugle d’un homme qui n’a pas une idée à soi. C’est la parade défilée de toutes les vieilleries auxquelles Balzac, et bien d’autres, et tout le monde, ont déjà répondu. C’est cette gravure allemande, la Revue des Morts, moins les Champs-Elysées, moins la poésie, moins surtout Napoléon. Voyez si vous ne connaissez pas le vide de toutes ces accusations !

Comme moralité, « Balzac est un enfant du XVIIIe siècle. » C’est tout à la fois « un matérialiste » et « un sceptique. » C’est par matérialisme, le croirait-on ! qu’il a fait Le Lys dans la vallée. C’est par scepticisme qu’il a écrit Séraphita. « Le plus repoussant spectacle que l’imagination malade puisse inventer, c’est La Comédie humaine… Elle est le délire de l’orgueil. » Le pessimisme