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il en a élargi les assises, et il l’a positivement élevé à l’état de Science, à force d’observations, de renseignements, de notions de toute espèce, d’une exactitude, d’une sûreté et d’une justesse merveilleuses. Il a supprimé le roman abstrait, l’homme abstrait dont nous nous sommes payés si longtemps, et il a mis à sa place le roman concret et l’homme tout entier ! Voilà l’héritage qu’il nous a laissé. Qui accroîtra cet héritage ? Balzac aura-t-il un successeur ? Qui le sera ? En aura-t-il un, de notre temps ? Y a-t-il déjà parmi nous, pressenti ou inconnu encore, un homme qui puisse à son tour prendre le sceptre du Roman, que pour prendre il faut d’abord soulever, et qui sache en augmenter la lourdeur pour les mains qui viendront après lui ? Questions dont la réponse est implicitement dans ce livre ! Fidèle au plan que s’est tracé l’Auteur des Œuvres et des Hommes (voir la Préface générale de l’ouvrage), il ne peut publier dans un seul volume que la première série des Romanciers contemporains, mais on y verra déjà très-clairement ce que Dieu donne pour remplacer un grand homme tombé ! Le nombre est tout, — dit la lâcheté moderne, qui a mis sur le nombre la vérité. Voyons donc le nombre aujourd’hui !


J. B. d’A.