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eût remplacés, le livre de Balzac n’est plus, sous sa dénomination abstraite et dure, qui étreint mal ce qu’elle veut embrasser, de l’observation libre, impersonnelle et lumineuse ! En vain est-il écrit avec cette furie de coloris qui fit de Balzac, en ses derniers écrits, quelque chose comme un Tintoret, d’une exaspération sublime, ce n’est, après tout, pour qui veut conserver son sang-froid devant cette magie, que la satire en action d’un colossal Archiloque qui avait au ventre une peur égale à celle de Pascal pour l’enfer, devant le « Robespierre aux cent mille têtes » et le communisme futur ; mais ce n’est pas la vérité !


II

Or, c’est la vérité que M. de La Madelène a voulu exprimer, la vérité locale, qui n’est jamais que locale en matière de paysan, la vérité des mœurs, des traditions et du langage d’une contrée entre toutes les autres, la vérité étroite, exacte, mais vivante cependant, car M. de La Madelène est un artiste qui a puissance de vie, et l’analyse chez lui double l’action sans l’étouffer. Son roman, qu’il aurait pu écrire peut-être comme l’auteur de Miréio écrivit son poëme, dans le dialecte de sa terre natale, écrit en français exquis, n’a pas cependant que son titre de patois, et roule dans son flot de délicieux provincialismes que M. de La Madelène a trop de tact d’écrivain pour laisser mourir.

Les idiotismes les plus charmants, ces locutions de terroir si