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de transport, de défaite et de pacotille, et M. About l’a compris !

Jeune, et par conséquent n’ayant pas la simplicité d’être littéraire, cette visée si contraire à l’américanisme de nos mœurs, M. About s’est dit que les livres n’étaient qu’une marchandise à débiter, et il s’est fait littérateur sur la voie. Il amuse le chemin avec son livre comme d’autres l’indiquent avec leur main tendue ou avec leur petit drapeau. Germaine et Maître Pierre avaient été destinés, dans la pensée de leur auteur, à cette Bibliothèque des Chemins de fer qui se présente à vous dans toutes les gares, pour alléger le poids d’un loisir forcé en wagon ou se mêler, sans trop y nuire, aux distractions que l’on y trouve ou aux conversations que l’on y fait. M. Edmond About est un des auteurs qui se vendent le mieux entre l’enregistrement d’une malle et le coup de cloche du départ. Il est léger et il s’enlève ! Sac de peu d’idées, commode à porter.

Quel que soit le sujet des livres de M. About, leur première condition est d’être taillés sur la durée moyenne d’un voyage, et cette condition impérieuse étranglerait net le talent le plus vigoureux. Ainsi être court, et surtout point fatigant, bon Dieu ! et cependant obligé d’être de son temps et d’intéresser des bourgeois blasés et même un peu pourris, voilà le problème. Mettre du citron dans sa limonade, mais pas trop, couper d’eau fraîche un vin trop fort, et cependant n’en pas abolir toute la force, opération de dosage et de mixture, alchimie littéraire dont le résultat produit immanquablement sur tant de volumes, vendus par le libraire, tant de petits sous à l’auteur. Pour