Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/112

Cette page n’a pas encore été corrigée

lui ! très-bien le fossé dans lequel se noyait la France. Il devint cardinal et ambassadeur, tout Babette-Bouquetière qu’il fût, pour sa peine d’avoir fleuri la Pompadour.

Que deviendra M. About, qui fait des bouquets d’un autre genre pour les boutonnières industrielles et les corsages de notre temps ?… Qui peut dire ce qu’il deviendra ? mais, à coup sûr, ce ne sera pas ce qu’un homme de talent consciencieux, profond et sévère, deviendrait jamais. Il y a mieux. Que n’est-il pas devenu déjà… ? Grâce à une souplesse cultivée de clown, — car à ses facultés naturelles M. About joint des études bien faites, — l’auteur de Germaine et de Maître Pierre a sauté déjà plus d’un de ces fossés que nous avons tous devant nous. Il a ce don terrible de facilité qui peut perdre les plus beaux génies, et ses succès ont été presque aussi faciles que ses œuvres. Seulement, comme il n’est pas ministre ou ambassadeur, et qu’il n’a pas renoncé à la littérature, nous voulons montrer comment la sienne est faite, et, dans l’intérêt des dupes généreuses qui aiment les lettres pour elles-mêmes, prendre la longueur et la force de ce bâton des lettres dans une main habile, quand elles ne sont plus qu’un bâton.

Or, pour atteindre ce but plus utile qu’on ne croit, nous avons choisi dans les œuvres de M. About les deux romans qui ne sont pas des contes pour rire qu’il ait publiés. Ils sont l’expression d’une pensée qui devra progresser, sous peine de n’être plus au niveau d’elle-même, car qui n’avance pas recule dans cette exigeante vie de l’esprit. D’ailleurs Germaine et Maître Pierre ont eu leur succès et l’ont encore, comme les autres