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méprise pas, mais je hais la poussière des affectations. Il y en a de plus d’une espèce dans ce livre, où l’on cherche vainement la simplicité, la grandeur, l’émotion, et une beauté sombre. « Je me dépouille pour mettre un peu d’ouate dans votre nid », dit Paul de Penarvan à la femme qui se soucie le moins de ouate et de nid. A la page 81, il y a un meunier qui compare sa fille, non-seulement « à une rose », mais à une hermine. » Les meuniers de mon pays, à moi, jouent du violon, mais ne sont pas si poëtes ! Il est vrai qu’en Bretagne l’hermine est presque de la couleur locale, et que sans celle-là nous n’en aurions d’aucune espèce dans le livre de M. Sandeau.

Donc, pour nous résumer, œuvre médiocre, vulgairement écrite, nulle de couleur et de caractère, nulle de conviction quelconque, convenable en décence, mais sceptique, avec deux ou trois situations, que l’auteur a trouvé le moyen de gâter encore, voilà l’œuvre à propos de laquelle on a dit que M. Jules Sandeau était plus moral que Balzac et plus vrai comme artiste. M. Jules Sandeau a trop de mérite et de connaissance de lui-même pour vouloir de cet éloge-là… On a ajouté, en comparant ses personnages à ceux de La Comédie humaine, que les personnages de Balzac marchaient la tête en bas, comme si on les voyait dans un plafond de glace. La tête qui a dit cela est certainement spirituelle, mais c’était elle qui était en bas… laissons-la dans cette position, et laissons Balzac en paix dans sa gloire bien gagnée ; ne lui comparons jamais personne. Il sera toujours Balzac, c’est-à-dire le Napoléon du roman au XIXe siècle,