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(comme on voudra !), blasé, raffiné, corrompu comme nous le sommes tous plus ou moins, qui chante la campagne à travers les idées de Paris, et l’amour comme on le fait à Paris. Il met très bien, en ce sens, les rues dans les bois et les bois dans les rues, et c’est peut-être ainsi — qui sait ? — qu’il faut entendre son titre : les Chansons des rues et des bois ! Seulement, on ne l’a pas entendu ainsi, et on a été implacable. Que dis-je ? on a été impertinent. C’est une impertinence, en effet, et une impertinence renforcée d’une inconséquence de la part de ceux qui ont admiré les Contemplations, que de cingler si fort un livre qui, évidemment, continue les Contemplations.

Mais rien — pas même l’impertinence — ne peut dispenser de la justice. On signala, dans le nouveau livre de Victor Hugo, alors qu’il parut, comme des modèles de ridicule inattendu, des défauts qui n’avaient de nouveau que la critique qu’on en faisait. On a parle pour la première fois sans respect de choses qui n’auraient dû étonner personne, tant elles font partie du genre de talent de Hugo, tant elles participent à la double essence de l’homme et de l’écrivain ! On a relevé avec moquerie les expressions turgescentes de ce talent gonflé par trop souvent de vide. On a dit le mal qu’il se donne pour être simple… et pour manquer son coup. On a dit son naïf travaillé comme un ouvrage de serrurier, et cette monstrueuse préciosité à faire revenir au naturel par l’épouvante les honnêtes filles de Gorgibus.