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versellement pris à ce titre fascinateur : les Chansons des rues et des bois, — car Victor Hugo a, au moins, le génie des titres ! Quoi de plus charmant, de plus rêveur, de plus faisant rêver que le sien ? Les Chansons des rues, de ces rues à la physionomie qui s’en va et que la Civilisation, cette boueuse qui emporte au bout du son balai toutes les poésies du passé, finira par cirer comme le parquet des corridors d’un ministère, — et les Chansons des bois, des bois, cette dernière aristocratie à qui on abattra la tête comme à l’autre, et pour les mêmes raisons. Que de choses un esprit qui pense invente-t-il et met-il sous ce titre-là ! Et si vous ajoutez : par Victor Hugo, le chansonnier de la délicieuse Chanson du Fou, dans Cromwell :

Au soleil couchant,

Toi qui va cherchant

Fortune… etc.

l’imagination se bercera voluptueusement dans l’idée d’un chef-d’œuvre. C’est là ce qui est arrivé. Malheureusement, en lisant le livre, on tombe de ce hamac. Et c’est là ce qui est arrivé aussi, même à moi. Il n’y a pas de rues dans ces Chansons des rues, et les bois, dans ces Chansons des bois, sont d’anciens bois connus, parcourus, — des bois littéraires et mythologiques. J’y avais déjà passé… J’y avais déjà été arrêté par deux mauvais drôles, dont l’un s’appelle le Fatras et l’autre l’Ennui. Franchement, en tant qu’il faille être