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concision rapide, et cela parla raison qu’elle est une réalité qui lui prend l’âme et l’emplit toute, et qui ne lui permet pas, à cet homme de mots, un mot de trop.

VI

C’est par cette héroïque Bataille d’Eylau que je veux en finir avec ces deux volumes. Elle me remet en mémoire ces dons que j’ai toujours adorés, proclamés et acclamés dans le poète de la Légende des Siècles, génie militaire s’il en fut, mais qui a chaviré dans la bêtise humanitaire ! Victor Hugo était, sans les lamentables déraillements de sa vie, destiné à nous donner un poème épique, cette grande chose militaire qui manque à la France, à qui pourtant les hommes épiques comme Charlemagne et Napoléon n’ont pas manqué. Un jour, ma critique lui donna le conseil de préférer une grande Épopée à toutes ses petites Épopées. Une le suivit pas, bien entendu. C’était au temps de la première Légende des Siècles. Il était trop glorieux pour écouter l’intérêt de sa gloire… En ce temps-là, c’était le moment de s’élever le premier dans l’ordre des Poètes ; mais, malgré ses facultés soidisant immortelles, il laissa passer ce moment-là.