Page:Barbey d’Aurevilly - Les Poètes, 1889.djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

tout, bombait seulement sur la platitude infinie la petite chose malpropre de M. Zola, que je crus d’abord que le succès de Victor Hugo enlèverait, comme un balai neuf ! Iln’y eut doncicique VictorHugoet sapuissance. Il n’y eut bien que Hugo tout seul. Il n’y eut que le poète et son œuvre : une œuvre qui n’était pas nouvelle ; un poète qui n’était pas nouveau, et qui ne nous donna pas, avec sa Légende des Siècles d’alors, une seule impression qu’il ne nous eut déjà donnée dans sa première Légende des Siècles.

Ah ! certes, il faut que nous soyons de bien bons enfants en littérature, si nous sommes en politique de mauvais garçons ; il faut que nos besoins d’originalité ne soient pas bien grands, à nous autres éreintés de l’époque actuelle, pour que nous soyons si aisément satisfaits de la répétition des mêmes idées, des mêmes sentiments, du même langage et presque des mêmes mots, des mêmes tableaux et de la même manière de peindre, et que nous en jouissions avec autant de pâmoison de plaisir et de furie d’enthousiasme que si tout cela était inconnu, inattendu, virginal, et tombé, pour la première fois, du ciel ou du génie d’un homme. Ah ! il faut que nous soyons bien profonds ou bien superficiels, pour qu’un second coup porté sur nos esprits et sur nos âmes retentisse sur co timbre sonore et sensible aussi fort que le premier, et même davantage. Il faut que nous ayons la peau bien tendre à la tentation… d’admirer, pour que nous admirions,