pas tout que d’être un grand poète et un délicieux conteur. Il y a eu des conteurs et des poètes avant et depuis La Fontaine. Mais il n’y en a jamais eu ayant joint, dans une fusion de cette harmonie, à la poésie la plus divine une bonhomie plus divine encore. Ce don exquis de la bonhomie dans l’Idéal, où elle n’est pas d’ordinaire, et sans que l’Idéal en soit diminué, est si frappant dans La Fontaine que tout le monde, et non pas seulement la Critique, lui a spontanément donné le nom de bonhomme, qui a remplacé son nom. A coup sûr, la Critique n’aurait pas mieux fait… C’est Le Bonhomme, en effet, que La Fontaine, dans le sens le plus général et le plus absolu ; ce n’est pas simplement Un Bonhomme. Walter Scott, par exemple, un autre conteur et un autre poète, a parfois aussi une bonhomie charmante… mais c’est parfois, et La Fontaine l’a toujours. Sa bonhomie, à lui, n’est pas une ou deux intonations dans la voix, mais c’est toute la voix qui a ce son et cet accent irrésistibles. La Fontaine est bonhomme comme il respire, — et j’ajoute comme il est gaulois, et c’est même parce qu’il est si fortement gaulois qu’il est si bonhomme ; car la bonhomie est une qualité appartenant particulièrement et suprêmement à la race gauloise. Je ne dis pas qu’elle ne puisse exister dans une autre littérature que la nôtre, puisque je viens de parler de Walter Scott, mais elle y est excessivement rare, — et jamais, jamais dans la proportion qu’elle a dans La Fontaine.
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