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III

C’est à lui que je dois revenir. Les deux autres, Edgar Poë et Baudelaire, ont eu leur destinée. Ils ont, enfin, à force de génie, violé cette gloire qui longtemps avait fait la bégueule avec eux, et ils l’ont maintenant, comme une maîtresse esclave. Mais Maurice Rollinat n’en est qu’où ils en furent toute leur vie avant de mourir. Il est en train, comme eux, d’acheter des torturesde la vie entière la justice qu’ils n’eurent que quand ils n’étaient plus. Je l’ai dit dès les premiers mots de ce chapitre, M. Maurice Rollinat a fait avec ses poésies ce que Baudelaire, à son âge, faisait avec les siennes. Baudelaire fut le rhapsode de ses Fleurs du Mal dans les quelques salons qui ne craignaient pas l’odeur, dardant la cervelle, de ces syringas terribles. Il les disait, ces Fleurs du Mal, avec cette voix douce et mystificatrice qui hérissait le crin des bourgeois quand il les distillait suavement dans leurs longues oreilles épouvantées. Rollinat est aussi son propre rhapsode, mais c’est un rhapsode d’un autre pincement de voix que l’ironique Baudelaire, ce diable en velours.,. Lui, Rollinat, c’est