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II

Voulez-vous les déguster avec moi, ces gouttes de poésie qui filtrent et glissent dans ce recueil de vers comme les gouttelettes de rosée sur les fleurs d’un bouquet, — de cette rosée qui vaut mieux que les roses qu’elle baigne ? Ce recueil de vers, fait par un artiste toujours inspiré, n’a pas cependant partout la même valeur poétique, et, je vous en préviens, ce n’est pas de celui qui joue avec son talent et son style et qui, par exemple, a écrit ces fameux : Sonnets gastronomiques, — lesquels ne sont, par parenthèse, que de brillantes et charmantes difficultés vaincues, —ce n’est pas de cet artiste que je veux vous parler. C’est du Monselet, de l’ancien Monselet, cela ; c’est trop du Monselet connu ! et ce que j’aime et veux vous montrer, c’est le Monselet nouveau, le Monselet inconnu tendre et chaste, et de cette nuance de mélancolie qui est le velouté de l’âme des poètes et que rien de la vie qu’il ont menée ne détruit, quand une fois ils l’ont. Roger de Beauvoir, qui mourut de la sienne, l’avait en mourant. Ce soupeur de la Maison-d’Or, qui s’enivrait de son esprit comme on