L’attentionpublique qu’il avait frappée au début, cette attention qui n’est jamais ni profonde ni durable en France, se détourna de l’homme qui, coup sur coup, publiait les Colifichets, l’Enfer et Paris, trois chefs-d’œuvre qui auraient dû la lui ramener. Mais l’attention publique a la tête petite. C’est une frivole et une étourdie, et quand on ne la prend pas par le chignon et par la nuque pour lui tourner la tête vers un chef-d’œuvre et lui mettre le nez dedans, elle ne le voit pas et ne songe même pas à le regarder. C’est cette main sur la nuque de l’attention publique que n’eût jamais Amédée Pommier, et qu’il ne réclama jamais de ceux qui pouvaient l’y mettre pour lui. Dans ce temps-là, Sainte-Beuve, cette femme de lettres qui passe encore pour un homme aux yeux de cette génération d’eunuques, Sainte-Beuve n’était pas dans l’opinion seulement un critique, mais la Critique ellemême. Il avait été le compagnon de jeunesse de Pommier, et il s’entendait trop bien en littérature pour ne pas dire, en passant, quelques mots flatteurs sur un talent dont la virilité devait être antipathique à sa faiblesse (les femmes anémiques craignent les hommes vigoureux ! ), maisce futlà tout. Sainte-Beuve n’a jamais consacré à l’auteur des Assassins, des Océanides, de Y Enfer, de Paris, une de ces Études qu’il méritait. Sainte-Beuve se dérobait à ce mérite. C’était pour lui une importunité. Il aimait mieux déterrer des cadavres oubliés, ce petit sergent Bertrand de la littérature !
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