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C’était modeste. Il était plus qu’un simple grenadier, ou s’il en était un, c’était La Tour d’Auvergne. Il avait, en effet, poétiquement, les qualités militaires du grenadier. ll en avait la force, la bravoure, la crânerie (il a fait un livre intitulé : Crdneries de tête et de cœur), et son vers, éclatant et dru, était la grenade qui portait la mort dans le rang. Je dis bien, en disant la mort, car il était un satyrique. Il l’était de tempérament et de vocation.

C’est, sauf erreur, par de la satire qu’il débuta, dans un moment où, excepté Barthélemy et Barbier, tous les poètes étaient emportés par le lyrisme contemporain. C’est à Barthélemy et à Barbier que se raccorde donc mieux qu’à personne le talent ferme de l’auteur du Livre de sang. Il est vrai que sa satire n’eut pas toujours cette portée historique restreinte et terrible. Elle tira à cible plus large. Elle fut, en somme, bien plus morale que politique. Mais les parentés de talent entre lui et l’auteur des Ïambes et celui de la Nêmésis sont évidentes ; ce sont les chênes tordus et noueux de la même forêt. Ce qu’il y a de commun entre eux, c’est la force, — la force, bien plus que la couleur.—Barbier et Barthélemy sont supérieurs comme coloristes. Barthélemy, ce Phocéenl’éclatlumineux de sa mère méditerranéenne ; Barbier, l’insurgé des ïambes, jailli de dessous les pavés de 1830, est une flamme rouge qui s’est assombrie et qui est devenue noire dans le Pianto. Mais sous