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ignobles et malheureusement volontaires d’expression, Thaleine des pires bouches, enfin tous les défauts dont l’auteur a fait comme à plaisir d’immondes vices, il restera et on trouvera, sous tout cela et malgré tout cela, un énorme noyau de poésie, résistant et indestructible, qui brillera de sa propre lueur dans l’histoire littéraire d’un siècle qui a des poètes comme Hugo, Vigny, Musset, Baudelaire et Lamartine, le plus grand de tous !

VI

Il l’est, en effet, au même titre qu’eux. Il a, comme eux, ce je ne sais quoi, impossible à déterminer et même à nommer, mais qu’on sent dans les profondeurs de l’àme maîtrisée… Les poètes qui diffèrent le plus de ce dernier venu par le sujet de leurs chants, lui ressemblent par cela seul qui les fait poètes. Or, ce qui fait les poètes, ce n’est ni la couleur, ni le relief, ni l’éloquence, ni aucune des forces qui font aussi les prosateurs, quoique les poètes puissent les avoir comme les prosateurs. C’est autre chose, — autre chose de bien autrement immatériel, qui ne tient pas à ce qu’on chante, mais à la manière dont on chante.